Parité homme-femme : l’Afrique peut augmenter son PIB de 287 milliards $ d’ici 2030 en copiant la Namibie (rapport)

L’Afrique pourrait ajouter 287 milliards de dollars à son produit intérieur brut (PIB) d’ici 2030, si tous les pays suivaient l’exemple de la Namibie, qui a réussi à augmenter la contribution des femmes âgées de moins de 35 ans à l’économie de deux points de pourcentage en l’espace de cinq ans, seulement grâce à l’élimination de plusieurs obstacles à leur participation au marché du travail, selon un récent rapport publié par la Fondation Mastercard.

Intitulé « Les jeunes femmes en Afrique : actrices de la croissance et de la transformation économiques à l’horizon 2030 », le rapport indique que la contribution des jeunes femmes (âgées de moins de 35 ans) au PIB du continent s’est établie à 11% en 2022, soit 340 milliards de dollars sur un PIB total de 3093 milliards de dollars.

En Afrique plus qu’ailleurs, le taux de chômage reste plus élevé chez les femmes que chez les hommes, et la pandémie de Covid-19 a encore aggravé la situation. Les jeunes femmes sont actuellement plus nombreuses à ne pas avoir d’emploi, et à ne pas suivre d’études ou de formation (NEET).

Pour estimer l’impact de l’élimination des obstacles à la participation des femmes au marché du travail sur le PIB du continent, le rapport a élaboré trois scénarios. Il s’agit d’un scénario statu quo (Business as usual) dans lequel les pays africains continueront à faire progresser la contribution des femmes à l’économie aux rythmes actuels, d’un scénario de pleine parité entre les sexes, et d’un scénario « meilleur en Afrique » (Best in Africa). Dans le cadre de ce dernier scénario, chaque pays ferait progresser la contribution des femmes au PIB à un rythme équivalent à celui du meilleur élève du continent en matière de parité homme-femme, en l’occurrence la Namibie. En cinq ans seulement, ce pays d’Afrique australe a enregistré la croissance la plus rapide en termes de contribution des jeunes femmes au PIB (de 40 % en 2017 à 42 % en 2022), en modifiant principalement les droits de propriété et les droits patrimoniaux. Sa politique nationale en matière de genre (PNG) a également amélioré les taux d’achèvement des études chez les filles ainsi que l’accès des femmes à la formation professionnelle, à la science et à la technologie.

Selon les modélisations réalisées, la contribution des jeunes femmes au PIB de l’ensemble des pays africains pourrait atteindre 919 milliards de dollars en 2030 dans le scénario de pleine parité, contre près de 405 milliards de dollars dans le scénario Business as usual, soit un gain de plus de 513 milliards de dollars. Ce scénario de pleine parité est cependant jugé peu probable en Afrique d’ici la fin de la décennie en cours.

Améliorer les compétences numériques des jeunes femmes

Dans le scénario « meilleur en Afrique », la contribution des jeunes femmes au PIB du continent pourrait atteindre 692 milliards de dollars en 2030. Ainsi, les jeunes femmes pourraient contribuer de manière importante à l’économie du continent, en y ajoutant 287 milliards de dollars et 23 millions d’emplois, si le modèle namibien était copié par les autres pays africains.  Ce scénario est jugé plus probable sur le moyen terme que celui de la pleine parité.

La République démocratique du Congo (RDC), l’Egypte, l’Ethiopie, le Kenya, le Mali, le Nigeria, le Rwanda, le Sénégal, la Tanzanie et l’Ouganda devraient connaître la croissance la plus rapide s’ils suivent l’exemple de la Namibie.

Pour assurer une meilleure contribution des jeunes femmes à l’économie, les pays africains devraient, en premier lieu, veiller à ce que les jeunes femmes restent à l’école, en luttant contre les mariages des enfants et les grosses précoces, et en répondant aux besoins des filles en matière de santé et d’hygiène menstruelles. Actuellement, 26 % des filles terminent leurs études secondaires et à peine 8 % sont inscrites dans l’enseignement supérieur, ce qui a un impact considérable sur leur accès à des emplois mieux rémunérés et, par conséquent, sur leur contribution globale au PIB.

Les autres actions à entreprendre consistent à permettre aux femmes de disposer de plus de temps en réduisant le poids de leur charge de travail, à travers des investissements publics et privés dans les services de garde d’enfants, et à améliorer l’accès aux services financiers (63% des femmes africaines, toutes tranches d’âge confondues, n’étaient pas bancarisées, contre 52% des hommes en 2020).

L’intérêt devrait également se porter sur l’amélioration des compétences des jeunes femmes dans des secteurs d’activité susceptibles d’accroître leurs revenus comme l’agriculture, l’industrie manufacturière, le commerce de gros et de détail, l’éducation, la restauration et l’hébergement, ainsi que sur le développement des compétences numériques des jeunes femmes afin de les rendre plus compétitives en soutenant par exemple les programmes qui favorisent l’enseignement des STEM (sciences, technologies, ingénierie et mathématiques) aux filles dans les zones urbaines et rurales.

Par ailleurs, les pays doivent adopter des lois plus favorables à l’épanouissement des jeunes femmes en tant qu’entrepreneuses, capables de créer du travail pour elles-mêmes et pour d’autres jeunes.

Le secteur privé est de son côté appelé notamment à promouvoir des stratégies de recrutement qui ciblent les jeunes femmes, à créer des initiatives visant à remédier aux déséquilibres entre les hommes et les femmes dans certains postes ou secteurs d’activité et à offrir des conditions de travail souples comme les horaires flexibles, afin d’aider les jeunes femmes à concilier leurs responsabilités professionnelles et familiales.

La société civile devrait, quant à elle, remettre en question les normes culturelles et les stéréotypes qui empêchent les jeunes femmes d’avoir accès aux opportunités qui s’offrent à elles.

Ecofin

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