DIMBOKRO/HÔTELLERIE: l’ex-complexe hôtelier Siétho cédé pour sa rénovation à 3 milliards

C’est plus qu’un ouf de soulagement pour la population de Dimbokro et du secteur du tourisme et de l’hôtellerie, après l’annonce du redémarrage, dans un futur très proche, des activités de l’ex-complexe hôtelier Siétho de Dimbokro. Cette reprise des activités dudit complexe hôtelier, fermé, il y a une quarantaine d’années, fait suite à une convention de concession conclue entre l’Etat de Côte d’Ivoire et le Groupe Famah La Renaissance SA.

Dans ladite convention, il est retenu à la charge du concessionnaire : la réhabilitation des bâtiments existants du complexe hôtelier, la construction de nouveaux bâtiments afin d’augmenter la capacité d’accueil de l’hôtel, l’exploitation, l’entretien, la maintenance et le renouvellement des biens composant le complexe hôtelier pour un coût global de trois (03) milliards de Fcfa. L’annonce a été faite, au cours du conseil des ministres du mercredi 16 octobre 2024, présidé par le chef de l’Etat, Alassane Ouattara. Celle-ci coïncide, un mois après, avec un de nos écrits, faisant appel au ministère de tutelle, aux structures décentralisées de l’Etat et aux cadres de la région, leur indiquant qu’en aucun cas, le complexe hôtel ne doit être abandonné, pour la simple raison qu’il symbolise l’histoire de la ville, voire de toute l’Afrique Noire. En effet, le complexe fait partie des héritages laissés par le Président Félix Houphouët-Boigny. Il sert d’une manière ou  d’une autre, de témoin des fêtes tournantes de l’indépendance, en Côte d’Ivoire.

L’histoire d’un complexe hôtelier dont personne n’en parlait

Le Président Félix Houphouët-Boigny, dans sa vision de doter les villes de Côte d’Ivoire d’infrastructures modernes de développement, organisait la fête de l’indépendance, de façon tournante. Les villes qui ont abrité les festivités de ces moments de retrouvailles et de souvenirs des luttes héroïques qui ont permis la libération des Ivoiriens de l’oppresseur blanc (sous la colonisation),   n’ont pas été  laissées pour  compte. Des routes, des réceptifs hôteliers, adduction d’eau potable, école, collèges, dispensaires… y sont construits. La ville de Dimbokro, en accueillant  en 1975, les festivités de l’an 15 de l’accession de la Côte d’Ivoire à l’indépendance (politique 1960), a bénéficié de ces inombrables infrastructures. L’hôtel Sietho de Dimbokro, géré par  la Société Ivoirienne d’Exploitation Touristique et Hôtelière en fait partie. Cet ancien réceptif, selon des témoignages, a même reçu, des invités de marque du Président Félix Houphouët-Boigny, à l’occasion de la  célébration de l’an 15 de l’accession à l’indépendance du pays (en 1975). L’établissement a fait ses beaux jours pendant longtemps, avant de sombrer en 1984.

Aujourd’hui, le complexe hôtelier n’existe que de nom. Cet ancien joyau architectural est entièrement abandonné dans des broussailles indescriptibles, au beau milieu de la ville, servant même de lieux de refuge pour toutes sortes de reptiles, aux morsures très mortelles. Pourtant, l’existant y est. Le bâtiment tient encore. La piscine est encore intacte. Le site couvre un grand espace encore exploitable pour d’autres activités connexes (Voir image). Une question de volonté politique ou un simple oubli ?

Plusieurs tentatives pour une reprise des activités du complexe hôtelier

Des ébauches pour une reprise du complexe hôtelier avaient eu lieu. Sous la houlette de l’ex-ministre du Tourisme, Charles Aké Atchimon, en 2011, l’on évoquait déjà sa restructuration.

«Il s’agit de confier la gestion des établissements d’hébergement et de restauration à une structure privée pour un meilleur rendement de l’activité. A travers cette session, l’Etat entend renforcer la notoriété des établissements d’hébergement et de restauration grâce à la renommée de l’enseigne, améliorer le taux d’occupation de ces établissements, former et professionnaliser le personnel, assurer la maintenance de ces établissements et renforcer les capacités opérationnelles de ces établissements », assurait le ministre d’alors, prédécesseur de Siandou Fofana, l’actuel ministre du Tourisme et des Loisirs. L’hôtel Sietho est au nombre des les complexes hôteliers à restructurer. Mais, pour des raisons diverses, la reprise des activités du complexe hôtelier tant attendue, n’a pas pu avoir lieu à temps.

Emboitant le pas à son prédécesseur, le ministre Siandou Fofana à, lui aussi, a fait la promesse de remettre l’établissement en état. En effet, invité en tant que parrain de la 8ème édition du Festival du tourisme de Dimbokro (Festourdim) qui s’est tenue du 30 mai au 1er juin 2019, à Dimbokro, le ministre avait inscrit la réhabilitation de l’ex-complexe hôtelier Siétho dans ses priorités, dans le cadre de la mise en œuvre de la Stratégie de «Sublime Côte d’Ivoire », au plan intérieur.

De toutes ces tentatives et annonces, le complexe reste l’ombre de lui-même.  

Bien que la rénovation du complexe ne dépendrait pas de la seule compétence directe du ministère du Tourisme et des Loisirs, l’histoire de toute une région et de toute la Nation ivoirienne ne saurait disparaitre pour un quelconque motif.

Pourquoi réhabiliter tous les patrimoines et sites historiques de Dimbokro ?

Dimbokro, c’est la Côte d’Ivoire. C’est aussi l’histoire de la Côte d’Ivoire. A travers son cimetière des Martyrs, elle retrace une époque vécue par les Ivoiriens. L’ex-hôtel de Sietho n’est en partie que l’un des patrimoines laissés par les fêtes tournantes de la célébration de l’indépendance de la Côte d’Ivoire. Dimbokro, faut-il le rappeler, a marqué et marquera pour toujours les esprits, pour ceux qui se souviennent encore.  Selon des récits ou études documentaires, que cette ville a été le théâtre de massacre pendant la lutte émancipatrice pour la liberté du peuple de Côte d’Ivoire, voire toute l’Afrique noire. Dimbokro, disons-le net, a été l’épicentre des atrocités pendant la période d’avant les indépendances où peuples africains, d’ici et d’ailleurs, sans aucune distinction de races et d’ethnies, d’appartenance religieuse, de rang social, combattaient tous ensemble,  pour une cause commune : le Droit à la liberté, le Droit aux Africains de disposer d’eux-mêmes, le  Droit à la vie tout court. La ville porte encore les stigmates d’une longue blessure, d’un passé très ensanglanté… Le cimetière des martyrs, où reposent depuis 1950 des combattants tombés au champ d’honneur parce qu’ayant choisi d’offrir leur poitrine pour la  cause des Ivoiriens, illustre à souhait de la barbarie du colon. D’autres villes ivoiriennes comme Bouaflé ou encore Séguéla, ont également subi les mêmes  affres de la décolonisation où reposent également des martyrs.

Malheureusement, ces martyrs tombés au champ d’honneur, sont passés dans les oubliettes. Peu d’Ivoiriens s’en souviennent ou feignent de ne pas en savoir, pour des raisons idéologiques ? Alors qu’ailleurs, ces martyrs seraient célébrés comme des héros, pour avoir mené une bonne cause. Mieux, l’on inscrirait les sites qui abrient leurs restes dans le patrimoine historique du pays, afin qu’ils servent de témoignages aux générations à venir. Mieux, ils devraient  servir de lieux de pèlerinage pour d’autres peuples qui voudraient toucher de près, ce passé triste de l’histoire de la Côte d’Ivoire ; voire de toute l’Afrique noire. Ailleurs encore, on aurait même faire de ces sites, des lieux d’études pour les étudiants du monde entier. Mais quel souvenir garde-t-on de ces monuments historiques? Que de remords ! Comme si ces personnes qui ont fait de la Côte d’Ivoire ce qu’elle est aujourd’hui, se sont sacrifiées pour une cause qui n’existerait pas. Et partout, chacun de nous, jouit du fruit de leur combat. S’ils ont accepté de mené ce combat, c’est parce qu’ils avaient un devoir de mémoire devant l’humanité et les enfants de leur époque. Leurs progénitures devraient en être fières, si une reconnaissance en mémoire de ces combattants de la lutte émancipatrice pour la libération des Ivoiriens, tombés au champ d’honneur, avait eu lieu. Leurs enfants, petits enfants et petits-fils ne  demandent que ça. Juste une reconnaissance nationale, voire même internationale, comme ce fut le cas de Sowéto. L’histoire d’un peuple, c’est d’abord son patrimoine, c’est-à-dire, ce que les anciens ont laissé comme souvenir. Car, toute œuvre humaine part du passé. Du passé, on conçoit et construit l’avenir, en se  servant des erreurs du passé. Et en ressuscitant la renaissance de l’ex-complexe hôtelier Siétho, c’est aussi un devoir de mémoire. A savoir, rappeler les circonstances de la construction de ce complexe hôtelier, le séjour  du Président Félix Houphouët-Boigny, premier Président de Côte d’Ivoire,  à Dimbokro, ville hôte de la célébration du 15ème anniversaire de l’indépendance du pays.

Honoré KOUASSI

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